le yoga, est-ce de la gym ?
Nous
avons tout récemment fait cours dans la salle de gym municipale, ce
qui nous a permis d'apprécier pleinement de nous servir du matériel
à disposition (utkatāsana à la barre, ardhasetusarvāṇgāsana
avec une poutre ou sur des pans inclinés par exemple).
Pour
autant, il ne faudrait pas en venir à penser que yoga = gymnastique.
Une
confusion qu'il est malheureusement aisé (et légitime) de faire, vu
que c'est essentiellement, - ainsi que les maîtres indiens le
déplorent - ce qu'il est aujourd'hui en Occident devenu...
pourquoi
cet amalgame ?
Yoga
et gymnastique ont en commun de s'occuper du corps. Et ce, avec des
outils parfois partagés, les récentes disciplines d'entretien
physique et de bien-être ayant beaucoup emprunté au millénaire
yoga. Cependant, à la différence de la gymnastique, le yoga ne
s'occupe pas que du corps (et encore moins que de ce
qui se voit dans le corps...), mais de l'être dans sa totalité en
tant qu'il est corps, émotions, pensées et énergie. Mais même
lorsque le yoga s'occupe du corps (comment ne le ferait-il pas...),
et même avec les moyens dont use aussi la gym (postures et
respirations, puisque c'est ce qui a le plus été repris), il
n'opère pas de la même manière, ni surtout dans le même but...
le
mode opératoire n'est pas le même...
Quand une musique rythmée donne le tempo d'un cours de gym (pour partir de
ce qui m'a frappée au début de celui auquel j'ai assisté), le yoga
se pratique en silence. En silence et en lenteur, voire en toute
immobilité, afin que les processus intérieurs puissent s'accomplir.
Les seuls mouvements ici - une fois installé(e) dans une posture -,
ce sont les micros ajustements dus aux muscles qui "lâchent",
c'est le (re)flux de notre souffle, donnant son rythme, son
allongement à la colonne vertébrale, c'est la circulation
retrouvée de l'énergie. Car la respiration est ici nourriture
sacrée, comme le corps est véhicule sacré, écrin de l'âme. Le corps est donc en yoga considéré comme un tout, et non découpé en
grands groupes musculaires sur lesquels on se focalise (en yoga,
l'attention est partout) et que l'on tonifie (ou que l'on étire, ça
revient au même) pour répondre aux exigences esthétiques de notre
société. Car enfin, la seule norme à laquelle le yoga entend
conformer le corps, c'est la structure, c'est le dessin qu'a pour lui tracé la Nature,
ce qui certainement exigera de nous qu'entre autres conditionnements,
l'on se défasse de nos (mauvais) shémas corporels (et cela,
certaines gymnastiques le font, certains "yoga" ne le font
pas...). Mais si le yoga commence par le corps (cette dimension de nous-même qui nous est assez "évidente"), si pour le yoga, le corps est le moyen, s'il
est l'indispensable moyen, il n'est pas la fin...
... ni
surtout le but
Au
fil des années de travail, le corps devient "habité de
conscience" (une formule de ma "maman spirituelle"), la chair se conscientise, se "spiritualise",
et nous atteignons à des couches de plus en plus profondes de nous-mêmes. De plus en plus subtiles. Jusqu'à un jour - si
c'est ce qui doit être -, parvenir à cette ultime strate où
nous ne sommes plus... qu'être. Où nous avons connaissance de qui "je
suis". Où nous avons l'expérience que "je suis", ahaṁ en sanskrit. Et c'est peut-être ce long processus de dénudement,
d'élimination progressive de toutes les fausses identifications qui
pourrait étymologiquement rapprocher le yoga, cet art sacré de l'Inde, de la gymnastique, du grec gymnos voulant dire "nu"... Mais...
ne le dirait-on pas mieux à l'envers : "un" ?, le yoga étant, je le rappelle ici, processus d'union.
Tathā bhavatu... (Puisse-t-il en être ainsi).
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